Workshop « Systèmes modèles précliniques en cancérologie »

Le workshop « Systèmes modèles précliniques en cancérologie » a réuni au Centre Paul Strauss près de 80 personnes le 15 novembre 2019.

La première intervention a été faite par le Dr  BALLOUL, directeur de l’innovation chez Transgène, qui a donné le point de vue de l’industriel sur la modélisation in vitro des tumeurs et l’application au développement clinique de nouveaux médicaments et à la médecine personnalisée. La demande de modèles précliniques pertinents est forte pour améliorer le transfert de l’efficacité préclinique à la clinique. Ces modèles doivent évoluer pour prendre en compte des paramètres tels que l’hétérogénéité des tumeurs, le microenvironnement, le passage de barrières biologiques, la dynamique des tumeurs… et les difficultés liées aux différences d’espèces souris/hommes, en particulier au niveau immunitaire. Les innovations de type organ on chip, tumoroïdes et l’apport technologique de la microfluidique ont été évoqués.

Les interventions ont ensuite été consacrées aux modèles de reconstruction de tissus/tumeurs in vitro.

Le Dr FLACHER a décrit la mise au point d’un modèle 3D de peau innervé, vascularisé et immunocompétent incluant des cellules de type kératinocytes, neurones, cellules de Schwann, cellules endothéliales et cellules dendritiques dans une matrice de collagène/chitosan. La mise au point d’un tel modèle fonctionnel est ardu mais apporte des potentialités énormes pour l’étude du crosstalk entre système nerveux et système immunitaire éventuellement dans un contexte tumoral.

Le Pr MANO a présenté ses travaux sur l’ingénierie tissulaire pour établir des modèles de tumeurs en 3D basés sur l’utilisation de matrices issues de matériel biologique humain. La complexité du microenvironnement tumoral doit être correctement modélisé in vitro pour aboutir à des modèles pertinents de criblage de drogues anti-cancéreuses. La combinaison de cellules souches mésenchymales, de fibroblastes et de cellules tumorales dans des microparticules d’acide hyaluronique produit des microsphères récapitulant des caractéristiques tumorales (telle que la présence d’un corps nécrotique).  Un autre exemple a été de proposer un lysat de plaquettes humaines modifié pour former des polymères de géométrie contrôlée permettant d’encapsuler des cellules de différentes natures.  La combinaison de ces sphères mullticellulaires à des systèmes microfluidiques pour mimer la dynamique tissulaire donne d’énormes possibilités d’exploration des systèmes.

La présentation du Pr ENTZ-WERLE portait sur les tumeurs pédiatriques dont les différences avec les tumeurs adultes doivent impérativement être prises en compte. Elle développe des lignées cellulaires issues de patients (gliomes de haut grade et ostéosarcomes) permettant d’appréhender l’hétérogénéité inter- et intra-tumorale et de tester la réponse aux drogues selon les caractéristiques moléculaires de la tumeur.  Les relations entre cellules souches tumorales et cellules plus différenciées peuvent par exemple être mises en évidence. Ce répertoire de lignées, qui conservent les caractéristiques de la tumeur primaire, représente un outil de choix pour développer des modèles 3D multicellulaires pertinents par rapport à la réalité clinique.

Les présentations suivantes ont concerné des modèles précliniques in vivo en particulier chez la souris.

Le Dr DORMOY propose des modèles de cancers du sein par injection de cellules tumorales humaines dérivées du patient dans le canal galactophore des glandes mammaires de souris. La prise de tumeurs est presque totale quel que soit la sous-classe de cancer du sein étudiée. Ces PDX intraductaux permettent d’étudier des stades plus précoces de la maladie que leurs correspondants cliniques. Les micro-métastases peuvent être détectées. Les caractéristiques de la tumeur initiale, telles que l’extension tumorale et les profils histopathologiques, sont préservées dans ces modèles.

Le Dr METZGER a présenté un modèle de carcinogénèse de tumeur de la prostate induit chez la souris après la puberté par la délétion conditionnelle de PTEN dans les cellules épithéliales prostatiques. Ce modèle récapitule toutes les étapes de la formation de la tumeur chez l’homme avec en particulier une phase de sénescence oncogénique avant l’expansion tumorale.  Il permet d’étudier la dynamique de la formation de la tumeur et la contribution d’autres types cellulaires (cellules myeloides par exemple) au cours du temps. Ce modèle permet également le test de drogues anti-cancéreuses qui peuvent être administrées à différentes étapes de la progression tumorale en particulier de façon préventive pour éviter la sortie de sénescence des cellules tumorales.

Le Dr BOURA a mis au point des modèles d’imagerie intravitale pour suivre la croissance et la vascularisation de tumeurs humaines xénogreffées dans la souris Nude. Deux types de fenêtres peuvent ainsi être créées, en position dorsale ou crânienne. L’implantation de ces fenêtres permet un suivi de la tumeur jusqu’à 130 jours (fenêtre crânienne) ainsi que le suivi de la perméabilité vasculaire en cours de traitements ou le devenir de nanoparticules thérapeutiques par exemple.

Enfin, le Dr LIMAGNE est intervenu en détails sur l’importance d’un immunomonitoring complet et dynamique pour faciliter le passage des essais précliniques à la clinique. La mise en évidence des altérations immunitaires induites par la tumeur et la corrélation de ces altérations à la réponse aux immunomodulateurs (anti-PD-1…) permettra de proposer des modèles prédictifs de réponse aux immunothérapies et de potentialiser l’efficacité des chimiothérapies.

Cette journée de travail a permis des échanges scientifiques de grande qualité confirmant l’intérêt de confronter des points de vue différents mais largement complémentaires. Aucun modèle, qu’il soit développé in vitro ou in vivo, n’est parfait pour récapituler une tumeur humaine dans son environnement spécifique et son hétérogénéité. Mais la complémentarité de ces approches est indéniable et la complémentarité des expertises apparait comme indispensable pour un transfert plus efficient de l’expérimentation préclinique à la clinique. La transdisciplinarité entre chimistes, physiciens, biologistes et cliniciens aboutira certainement dans l’avenir à la proposition de thérapies efficaces en clinique humaine.

Modérateurs

Monique Dontenwill - UMR CNRS 7021 - Laboratoire de Bioimagerie et Pathologies - Team Leader "Tumoral signaling and therapeutic targets" - Faculty of Pharmacy, University of Strasbourg

Stéphane Dedieu - UMR CNRS 7369 MEDyC - Team Leader "Extracellular matrix, Cancer and Therapeutic targets" - Université Reims Champagne-Ardenne

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